Joseph Kessel - La Passante du Sans-Souci [critique]
9/7/2020
Lire un volume de la Pléiade est tellement agréable que j'ai enchaîné avec un nouveau roman de Joseph Kessel – trois à la suite ! Et mon choix, cette fois-ci, s'est porté sur La Passante du Sans-Souci, un ouvrage paru en 1936 chez Gallimard. Salué par la critique à sa parution comme le plus beau roman de Kessel depuis Les Captifs, La Passante du Sans-Souci mérite amplement les éloges qu'elle a reçu au fil des décennies.
Montmartre au petit jour. Chaque matin, le narrateur, attablé au Sans-Souci, voit passer une femme dans la rue. Elsa Wiener, il l'apprendra bientôt, a fui l'Allemagne. Son mari Michel y est resté, enfermé dans un camp de concentration. Elle chante dans les boîtes de nuit et vit seule avec un enfant juif, Max, que les nazis ont rendu infirme. Le narrateur va être pris d'une soudaine et impétueuse fascination pour la jeune femme.
AUTOFICTION AVANT LA LETTRE
Situé à la fin des années folles et préfigurant la montée du nazisme en Allemagne, La Passante du Sans-Souci est, pour les spécialistes, le premier roman à parler des camps de concentration. Juif et résolument anti-hitlérien, Kessel signe avec ce roman un récit antifasciste très personnel. Significativement écrit à la première personne, Kessel présente de nombreux traits communs avec le narrateur de son roman, lui aussi écrivain-journaliste et partageant avec l'auteur un goût immodéré pour la vie parisienne nocturne. En cela, on peut dire que La Passante du Sans-Souci est une autofiction avant la lettre parue à une époque où le terme n’existait pas encore.
Fluide, lyrique et prenant, La Passante du Sans-Souci est un roman de qualité ainsi que la première histoire amour de l'auteur depuis Belle de jour, huit ans auparavant. Pour ces deux raisons vous n'avez pas d'excuses, vous devez absolument lire ce roman !